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ENTREVUE

Durant la pandémie, notre directeur François Daoust a contacté différentes personnes consacrées et prêtres pour leur poser des questions sur les changements vécus depuis le début de la crise.

Jean-Marc Barreau

Prêtre, intervenant en soins spirituels en soins palliatifs, professeur, membre de l'Institut séculier Voluntas Dei

Quel est le rôle d’un intervenant en soins spirituels?

C’est offrir un accompagnement spirituel, quelles que soient les aspirations spirituelles du malade, du patient, avec une insistance particulière sur la dimension spirituelle humaniste. Je veux dire, toujours partir de l’humain et de ses désirs. Pour les catholiques, c’est proposer un accompagnement chrétien, y compris par les sacrements. En soins palliatifs, l’onction des malades (anciennement l’extrême onction) est très apaisante, même très thérapeutique au sens précis du terme.

 

En ce temps de crise, qu’est-ce qui a changé dans votre pratique?

L’exigence à la disponibilité. Il faut être beaucoup plus disponible. Les patients, les malades et les familles vivent toutes sortes de stress ou de détresse spirituelle. On est « consacré »à la disponibilité d’une certaine manière.


C’est donc une insistance à la présence. Dans un article Facebook, j’insiste sur l’impuissance spirituelle et la présence. Nous ne sommes plus beaucoup dans l’intervention. Tantôt, j’étais avec un patient. J’étais là avec lui, tout simplement. Plus tard, j’étais là avec une malade, avant qu’elle ne décède, car sa famille avait peur du virus. C’est être une présence silencieuse. Notre attitude prévaut sur ce qu’on aurait fait. Il faut simplement être là, comme Jésus avait fait avec les disciples d’Emmaüs (Luc 24, 18-35).


Par rapport aux professionnels de la santé, ils vivent une certaine détresse. Ils vivent des situations très difficiles au niveau professionnel et familial (particulièrement la peur de contaminer leurs proches). Ma pratique consiste à être une oreille attentive, un écoutant. Par exemple, cet après-midi, on m’a remercié simplement d’être là avec les infirmières lors d’un moment de répit. La réalité spirituelle donne sens, elle est de ce fait sécurisante. La pandémie cause une véritable incertitude et donc une grande vulnérabilité (pour tout le monde).

 

Comme prêtre, pourquoi est-il important pour vous d’accompagner les malades?

La mission du prêtre c’est d’être premièrement consacré dans notre humanité. On a une mission à être plus humain que les humains. Si on avait à rendre présent le Christ aujourd’hui, le Christ serait super humain. Le prêtre a une vocation à l’humanisme intégral (comme disait saint Jean-Paul II). Il y a donc un effet insoupçonné à la crise actuelle, il n’y a plus ce clivage : prêtre, pas prêtre. Maintenant, je suis un accompagnateur, tout simplement.


Ensuite, je trouve important de retrouver la grandeur et le goût des sacrements. La plupart des baptisés ne pourront pas communier pour Pâques cette année. Cela conduit chaque baptisé à se poser la question de son rapport aux sacrements. Une habitude ? Ou une véritable nourriture spirituelle ? Qu’est-ce que je fais des sacrements dans ma vie ?


Le prêtre retrouve sa fonction première de mettre en relief la grâce des sacrements. Il y a une force, une grâce, un charisme dans le sacrement de l’onction des malades. J’aimerais que les prêtres retrouvent la force de ce sacrement des malades. Il y a une force thérapeutique dans ce sacrement. Les gens ont soif, ils ont faim à la fin de leur vie et redécouvrent ce que veut dire se nourrir de la Parole de Dieu et du pain de l’eucharistie.


Finalement, le prêtre en cette période-ci est acculé à redécouvrir son intimité avec Jésus. Actuellement, on est dépassé par la situation. C’est dans notre messe quotidienne qu’on va donner à Jésus ces situations dramatiques. C’est bon de découvrir que les difficultés actuelles nous dépassent, que l’Église nous dépasse, que la vocation chrétienne des personnes nous dépasse.

 

Avez-vous peur d’attraper le coronavirus?

Non, je suis extrêmement vigilant. Je suis vigilant pour moi, mais en premier lieu pour le corps professionnel avec lequel je travaille, l’ensemble des patients et des familles. Je prends les mesures sanitaires nécessaires : masque, jaquette et gants ; matériels qu’il faut changer entre chaque malade. Cette protection, je la porte au nom de l’Évangile, car c’est le respect de la Vie et une responsabilité interpersonnelle.

Jean-Marc Barreau

Crédit photo : Jean-Marc Barreau

 

Dans toute cette situation, quel « clin d’œil » Dieu vous fait-il?

Vraiment de redécouvrir le moment présent, l’ici et maintenant. Nous vivons dans l’incertitude, et pour vivre une certaine paix intérieure, il faut vivre la grâce maintenant. On passe notre vie à faire des projets (à tous les niveaux : famille, voyage, travail. Spirituel, pastoral, etc.), mais là ce n’est plus de projets que nous vivons, c’est l’instant présent.

 

Quelle espérance vous anime?

La certitude que cette pandémie n’est évidemment pas voulue par Dieu. Nous ne sommes pas dans la logique des 10 plaies d’Égypte. J’insiste, ce fléau n’est pas de Dieu. Et c’est aussi la certitude que Dieu veut en faire émerger quelque chose de plus grand. Mais Il est engagé plus que nous. Il va en sortir quelque chose de plus grand, aux niveaux spirituel, ecclésial, écologique, économique, relationnel, familial, et même de pardon. Je n’ai jamais vu autant de patient-es demander à appeler un proche pour demander pardon. C’est que Dieu est infiniment miséricordieux et sa miséricorde enveloppe le mal jamais pour le justifier, mais toujours pour proposer un chemin de lumière.

 

Si un jeune se posait la question de la vocation à la prêtrise en soins spirituels, que lui diriez-vous?

Discernement ! Parce que la prêtrise n’est pas un métier, n’est pas une fonction, mais bien une consécration. Il faut discerner avec un accompagnateur, car on ne devient pas prêtre pour donner  seulement 10 ans de notre vie, mais bien 70 ans de notre vie au Christ. Tu dois t’arrêter et être accompagné auprès de quelqu’un en qui  tu as confiance. Et être prêtre, c’est la plus belle des vocations. Si le Seigneur t’y appelle vraiment, alors… go mon gars, vas-y !

 


L’institut séculier Voluntas Dei

C’est un institut qui a été fondé par le père Louis-Marie Parent, un prêtre oblat de Marie-Immaculée, qui a une vocation séculière : être prêtre dans le monde, de manière analogue au prêtre ouvrier ou  de l’action catholique. Le charisme de l’institut est d’être présence au monde, en étant pleinement consacré, pleinement prêtre. Chacun des membres doit travailler pour subvenir à ses besoins.


Pour en apprendre plus : www.voluntasdei.org

 

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